Notre communion avec la Terre-Mère
En ce mois de juillet 2021, la Belgique a connu, avec d’autres pays européens, des intempéries et des pluies d’une violence inouïe. Cela faisait quelques années que le pays n’avait pas connu une telle variation climatique. Les dégâts sont tellement énormes que des questions doivent se poser. De bonnes questions. Pourquoi en sommes-nous là aujourd’hui ? Beaucoup diraient qu’il n’y aucune corrélation entre les inondations de ces derniers jours et le réchauffement climatique. Pour d‘autres par contre (les éco-anxieux), ces intempéries sont le résultat du changement climatique.
Le mauvais aménagement du territoire reste tout de même la cause première d’inondations catastrophiques. Sur le terrain, cela se remarque par une très forte imperméabilisation, la perte de couvert forestier, d’espaces naturels, de haies et de zones humides qui font office d’éponge et de barrières naturelles: les sols saturés en eau ne peuvent plus absorber des précipitations exceptionnelles qui se déversent dans les fonds des vallées (Ecological Footprint, 2020).
Le rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) publié en 2014 souligne qu’il est très probable que les vagues de chaleur se produiront plus souvent et dureront plus longtemps, et que les événements de précipitations extrêmes deviendront plus intenses et fréquentes dans de nombreuses régions. Il est clair que même si le changement climatique n’est pas à l’origine de ces inondations, il contribue tout de même à amplifier leur intensité. On constate ces dernières années que l’intensité des événements météorologiques remarquables augmente. Leur sévérité a ainsi été aggravée par le changement climatique. En accélérant la fonte des glaciers, et donc la montée du niveau de la mer, le réchauffement climatique impacte l’accélération et l’aggravation des risques d’inondation. Les climatologues s’entendent tous pour prévoir une montée du niveau de la mer de plus de 1m d’ici à la fin du 21ème siècle (GIEC, 2014).
Il est temps de s’inscrire dans la prévention à grande durée pour éviter de vivre de pareilles catastrophes. C’est le moment de penser à la construction des digues pour prévenir les crues centennales (les crues qui ont une chance sur 100 de se produire tous les ans) et aussi de mettre en place des bassins tampons en amont des territoires à risque pour parer au risque de débordement ou d’engorgement (Planète & Environnement, 2021). A côté de cela, les trottoirs goudronnés qui retiennent l’eau en surface et contribuent à l’engorgement des réseaux d’évacuation laisseraient plutôt la place à des trottoirs gazonnés ou en béton et bitume perméables et drainants. Des bassins de rétention des eaux de pluie, situés en amont des zones à risque, peuvent également être prévus pour permettre de contenir les eaux excédentaires avant que celles-ci n’atteignent les zones habitées ou construites. Les habitants d’une zone inondable sont également tenus de diminuer les eaux rejetées dans les égouts collectifs. Il est en effet tout à fait faisable de mettre en place un système de zones humides individuel qui permettra de conserver les eaux pluviales sur son propre terrain, plutôt que de les envoyer grossir le flux qui sature les réseaux d’évacuation publics.
S’il revient à l’autorité de l’Etat de s’occuper de ces structures, il n’en demeure pas moins qu’au niveau individuel les citoyens sont appelés à assumer leurs responsabilités en s’assurant d’un important couvert arboré qui permet d’évacuer plus efficacement l’eau par le sol (Paroles de Chrétiens, 2020). C’est toute la question de planter encore et toujours des arbres qui surgit. L’arbre est refuge, il est symbole de fécondité. Dressé vers le ciel, profondément enraciné dans le sol, l’arbre est aussi le symbole de l’homme sage qui respecte la terre et regarde Dieu (Jr 17, 8). L’arbre est un lien entre Dieu et les hommes. Dieu parle à travers sa Création, et tout particulièrement par les nombreux symboles que nous offrent les Écritures. L’arbre est tout d’abord le symbole de la foi. Celui qui met en Dieu sa foi et son espérance est protégé par Lui. C’est le fondement central de notre communion avec la terre-mère, comme nous le rappelle le pape François (à l’occasion de 50ème anniversaire de la Journée mondiale de la Terre, avril 2020). « C’est une opportunité pour renouveler notre engagement à aimer notre maison commune et à prendre soin de celle-ci et des membres les plus vulnérables de notre famille…Nous avons failli à prendre soin de la terre, notre maison-jardin, et à prendre soin de nos frères. Nous avons péché contre la terre, contre notre prochain et, en définitive, contre le Créateur, le Père bon qui s’occupe de chacun et qui veut que nous vivions dans la communion et dans la prospérité. »
Les responsabilités collectives et individuelles sont à porter par tous et toutes et permettre ainsi à notre humanité de profiter de la communion naturelle que l’environnement lui propose. Cette responsabilité est physique et morale et implique une prise en compte réelle des besoins primordiaux de l’environnement et de l’homme en vue d’une vie harmonieuse.
Depuis ce 29 juillet, l’humanité tout entière vit à crédit car elle a utilisé toutes les ressources biologiques que la Terre peut produire en une année (Global Footprint Network, 2021). Nous allons donc devoir vivre à crédit durant plus de cinq mois alors que l’empreinte écologique était redescendue l’an dernier à -9,3% en raison de l’épidémie mondiale de la covid.
La responsabilité morale évoquée plus haut doit être mise à contribution pour éviter à l’environnement de subir des dommages pouvant être à l’origine de nombreuses autres catastrophes climatiques.
Alain Boubag.
Août 2021