Comme chaque année depuis 1968, l’Eglise Catholique débute la nouvelle année en célébrant la Journée mondiale de la Paix. C’est le pape Paul VI qui en posera les premiers jalons dans la seconde moitié du siècle précédent. Cette journée n’est pas à confondre avec la Journée internationale de la paix proposée par l’ONU et qui, elle, est célébrée le vingt et un septembre de chaque année.
Le Pape François, fidèle à ses convictions pastorales et théologiques, propose pour 2021 un thème basé sur la culture de soin comme parcours de Paix. C’est tout un univers de soins. Un véritable programme. Il est vaste et ne peut être concentré uniquement sur une année civile. Ce programme est appelé à durer et à se prolonger sur des années voire des décennies. Une culture du soin. Pourquoi ? « Pour éliminer la culture de l’indifférence, du rejet et de l’affrontement, souvent prévalente aujourd’hui. »
Après avoir fait un rapide parcours des différents moments bibliques où Dieu prend soin de son peuple et de sa création, le pontife romain décrit les réalités actuelles traversées par toutes les sociétés du monde, comme un profond manque de soin exprimé les uns à l’égard des autres. Ceci est valable aussi bien pour les hommes entre eux que pour les hommes à l’égard de l’environnement. La pandémie de la covid-19 a malheureusement renforcé ce sentiment de la culture de la négligence et du rejet avec les graves conséquences que l’on connait aujourd’hui : dignité humaine bafouée, environnement délaissé. Le pape ne se départit en aucun cas des lignes directrices qui caractérisent ces deux dernières encycliques, à savoir l’écologie et l’environnement avec Laudato Si’ et la fraternité humaine et l’amitié sociale avec Fratelli tutti.
L’année qui vient de se terminer aura laissé plus d’interrogations qu’elle n’aura apportées de réponses aux questions de notre humanité. Elle laisse derrière elle une humanité encore plus fragile, désarçonnée par un virus dont on essaie, jusqu’à ce jour, de comprendre le fonctionnement, l’agressivité et les multiples variations. C’est peu de dire que 2020 aura été une formidable pagaille avec comme conséquences, « des crises très fortement liées entre elles, comme les crises climatique, alimentaire, économique et migratoire, et provoquant de grands inconvénients et souffrances.»
Devant autant de pertes de repères et de difficultés de tous ordres, le pape propose de se tourner vers une culture de soin. Cette culture requiert une attitude de respect, de compassion et de solidarité de l’humanité à son propre égard et aussi à l’égard de ce qui l’entoure, c’est-à-dire son environnement. Il définit lui-même cette culture de soin comme « cet engagement commun, solidaire et participatif pour protéger et promouvoir la dignité et le bien de tous, cette disposition à s’intéresser, à prêter attention, à la compassion, à la réconciliation et à la guérison, au respect mutuel et à l’accueil réciproque. » C’est, encore une fois, un appel à se tourner vers les plus faibles et les plus pauvres pour les conduire sur le chemin de leur dignité, celle de l’humain et de son milieu environnemental. Il y a bel et bien un message écologique que veut faire passer le successeur de Pierre à savoir : l’humain doit reconsidérer sa place parmi les vivants. Le système économique actuel n’a eu de cesse de contribuer à la dégradation des conditions de vie sur notre planète avec une non prise en compte de l’animal, du végétal et parfois de l’humain lui-même. « Le soin doit devenir l’objet d’une politique générale et le principe de toute action future. Nous ne pouvons ignorer notre dépendance à la Terre et aux conditions géophysiques de toute existence. La leçon vaut pour aujourd’hui et pour demain. Si nous devions l’oublier, une fois encore, trop pressés de refermer la parenthèse Covid-19, alors les pandémies du futur, associées à la perte de la biodiversité et au réchauffement climatique, pourraient être bien plus dramatiques avec un impact encore plus important sur nos sociétés humaines. »
N’est-ce pas à cette tâche que VIVAT s’attèle depuis quelques années pour rendre à l’humain et à son environnement la qualité de vie espérée ? Le chemin est long. L’espérance est tenace. La Doctrine sociale de l’Eglise n’est-elle pas encline à encourager tous ceux et toutes celles qui souhaitent prendre un engagement pour rendre authentique la dignité humaine ? Le souverain pontife invite les personnes de bonne volonté à s’investir dans la création d’un Fonds contre la faim pour aider les plus précaires à se relever. Il s’agit de « créer un « Fonds mondial » avec l’argent dépensé pour les armes et autres dépenses militaires afin d’éliminer définitivement la faim et de contribuer au développement des pays les plus pauvres». Cet appel, trouvera-t-il un écho favorable, non seulement auprès des décideurs politiques mais aussi auprès de toutes les personnes de bonne volonté ?
Avec les bouleversements et la misère occasionnés par la covid-19, 2021 sera une année-test de solidarité pour voir à quel point l’humanité peut se ressaisir et faire face à un ennemi commun. Une belle opportunité est offerte pour que se mette réellement en pratique une culture du soin de l’humanité par rapport à elle-même et par rapport à son environnement.
Alain Boubag
François, Culture du soin comme parcours de paix. Message pour la célébration de la 54ème Journée mondiale de la Paix, janvier 2021, n°1.
Idem, n°1.
Alain Coulombel et Eric Causmes, « Covid-19 : une épidémie révélatrice d’une crise écologique et sociétale, » Tribune-Libération du 10 janvier 2021.
François, Culture du soin comme parcours de paix, n°7.